ES OUVRAGES D'EMAIL.



Ce que c'est que l'Email.
L'Email est une espèce de Verre coloré. Le Verre qui sert à faire l'Email s'appelle Cristalin, & se fait avec la meilleur Soude d'Alicante & du Sablon, vitrifiés ensemble. L'Etain & le Plomb, mis en partie égales, & calcinés au feu de reverbère sont, avec ce Cristallin , la principale composition de l'Email.

Trois sortes d'Emaux.
On distingue trois sortes d'émaux, I. ceux qui imitent les pierres précieuces; 2. ceux qu'on emploie pour la peinture en Email; 3. ceux dont on fait divers ouvrages agréables & curieux. La composition des ces trois sortes d'Emaux est la même pour le fond.

Ces derniers Emaux, qui viennent de Venise & de Hollande, sont en petits pains plats de différentes grandeurs, ordinairement de 4 pouces de diamètre, & de 4 à 5 lignes d'épaisseur. Les couleurs les plus ordinaires des Emaux de Venise sont le blanc, la couleur l'ardoise, ou gris de lin, le bleu celeste, la couleur de chair, le jaune, le verd, & un autre bleu plus foncé, que les Émailleurs appellent Faux Lapis.

Ces 7 couleurs sont comme les matrices des toutes les autres qui naissent de leur mêlange. Ces Emaux sont propres aux Orfèvres, aux Emailleurs sur l'or, sur l'argent & les autres métaux. Les fayenciers s'en servent aussi, du moins du blanc, pour donner de l'éclat & du vernis à leur Ouvrage.

Comment se font les Ouvrages d'Email.
Les Ouvrages qu'on fait avec les Emaux se travaillent au feu d'une lampe enfermée dans une boîte. On met cette lampe sur une planche. Lorsque les Ouvrages ne sont pas de longue haleine, au lieu d'un double souflet d'orgues, dont ont se sert ordinairement pour exciter la flamme des lampes, quand on en met plusieurs sur la table, on se sert d'un tube, ou tuyau de verre, par lequel on soufle à la bouche pour aviver la flamme des lampes.

Les filets d'Email qui se tirent à cette lampe sont d'une finesse & d'une délicatesse extraordinaire. Ceux dont on se sert pour faire de fausses aigrettes, sont si déliés, qu'on les peut tourner & plier sur un dévidoir, comme on feroit de la soie ou du fil.

Ces Jais factices de toutes couleurs, dont on se sert dans les broderies, sont aussi faits d'Email, & cela avec autant d'art, que chaque petite partie à son trou pour y passer la soir, avec laquelle on le brode. Ces trous se font en les souflant en longs morceaux, qu'on coupe ensuite avec la Lime ou Couperet, qui est une instrument d'acier, plat & tranchant, de plus d'un pied de longueur.

Lorsqu'un filet doit être long, & qu'il passe l'étendu du bras de l'Ouvrier, un Compagnon en tire un des bouts, tandis que celui qui travaille, continue de présenter son Email au feu de la lampe; cela s'appelle, tirer l'Email à la course. Ces fils ainsi tirés se coupent à froid avec le Couperet en plusieurs morceaux, ordinairement depuis 10 pouces jusqu'à 12.

Tous les Emaux, tirés de la lampe, sont ronds, mais on les veux plats, on les aplatit, lorsqu'ils sont encore chauds, avec une pince de fer, dont le mord est quarré.

Lorsque l'Emailleur travaille, il est assis devant la lampe, le pied sur une marche qui fait hausser & baisser le souflet, & tenant de la main gauche l'ouvrage qu'il veut émailler, ou les fils de léton ou de fer, qui doivent faire le bati de ses figures, il conduit de la main droite le fil d'émail, qu'il présente au feu de sa lampe, & cela avec une adresse & une patience admirables.

Des tubes de verre de diverses grosseurs servent à soufler l'Email en différentes manières, & à y conserver les vuides convenables, ou pour y épargner la matière, ou pour former les contours.

On peur représenter quantité de choses avec l'Email, & l'on en voit des figures si bien faites & si bien achevées, qu'on les croirait sorties des mains des plus habiles Sculteurs.



 La gravure      La peinture en émail